SPOTLIGHT #16 : La Réforme de la procédure civile

SPOTLIGHT #16 : La Réforme de la procédure civile

Chez Lead up, nous nous engageons à fournir à nos clients les solutions les plus innovantes en matière de résolution des conflits, adaptées à leurs contextes sectoriels spécifiques. Pour ce faire, nous devons rester à l’affût des développements récents dans les secteurs de nos clients et analyser ces évolutions en fonction de leurs besoins. Chaque mois, dans le « Lead up Spotlight », nous partagerons avec vous – nos collègues, clients et partenaires potentiels – notre analyse sur un développement récent relatif à la résolution des conflits dans un secteur qui nous tient à cœur ainsi qu’à nos clients.

Le « Lead up » Spotlight de ce mois-ci se concentre sur la réforme de la procédure civile française intervenue le 1er septembre 2025 à la suite des décrets n° 2025-660 du 18 juillet 2025 portant réforme de l’instruction conventionnelle et recodification des modes amiables de résolution des différends (MARD), et no2025-619 du 8 juillet 2025 portant diverses mesures de simplification de la procédure civile, dit « Magicobus 2 ».

Cette réforme marque un tournant vers la contractualisation du procès civil, la simplification et une meilleure lisibilité des textes, ainsi que la promotion des solutions amiables.

Voici un éclairage sur les principales nouveautés de cette réforme :

  1. L’instruction conventionnelle érigée en principe

L’instruction conventionnelle devient désormais la règle, tandis que l’instruction judiciaire reste l’exception. Le déroulement du procès doit ainsi reposer sur l’accord des parties, sous le contrôle du juge : « Dans le respect des principes directeurs du procès, les affaires sont instruites conventionnellement par les parties. À défaut, elles le sont judiciairement » (art. 127 CPC modifié par l’art. 3 du décret n° 2025-660).

Forme de l’accord des parties
Les parties peuvent formaliser leur accord par :

  • Une convention de procédure participative (art. 130 à 130-7 CPC créés par l’art. 3 du décret n° 2025-660) : contrat solennel, écrit (sous peine de nullité) et signé par les parties et leurs avocats, pour organiser la mise en état du litige.
  • Une convention d’instruction de l’affaire en la forme simplifiée : moins formelle, conclue directement entre avocats, entre une partie non représentée et un avocat, ou entre les parties elles-mêmes lorsque la représentation n’est pas obligatoire. La convention ne requiert pas la signature des parties ; elle peut être simplement constatée par écrit ou produite par conclusions concordantes au juge.

Objet de l’accord
Ces conventions relatives à la mise en état peuvent porter sur l’instruction de l’ensemble du litige ou sur certaines mesures d’instruction. Les parties peuvent notamment :

  • Déterminer les points de droit sur lesquels limiter le débat ;
  • Fixer les modalités de communication des conclusions et pièces ;
  • Consigner les auditions des parties, leurs réponses et observations en présence de leurs conseils ;
  • Enregistrer les témoignages de toute personne acceptant de se prononcer sur les faits observés (art. 128 CPC modifié par l’art. 3 du décret n° 2025-660).

Les parties peuvent également désigner un technicien (expert, consultant, etc.) pour éclairer une question technique liée à leur différend. Elles déterminent sa mission et sa rémunération (art. 128, 3° et art. 131 CPC modifiés par l’art. 3 du décret n° 2025-660).

Le technicien doit garantir son indépendance et impartialité (art. 131-1 et 131-2 CPC modifiés par l’art. 3 du décret n° 2025-660) et peut désormais concilier les parties (abrogation de l’art. 240 CPC).

Le rapport du technicien produit dans le cadre d’une convention entre avocats acquiert une force probante renforcée (art. 131-8 CPC modifié par l’art. 3 du décret n° 2025-660) et s’impose aux parties sauf preuve d’inexactitude.

Effets de l’accord
Les affaires instruites conventionnellement bénéficient d’un audiencement prioritaire (art. 127 CPC).

Par ailleurs, la conclusion de la convention :

  • Interrompt le délai de péremption de l’instance ;
  • Ne dessaisit pas le juge, qui connait de toute demande liée à la convention, des incidents, des exceptions de procédure et des fins de non-recevoir et peut ordonner toute mesure conservatoire ou provisoire (art. 129-3 et 130-3 CPC créés par l’art. 3 du décret n° 2025-660).

À défaut d’accord, le dossier est renvoyé devant le Juge de la Mise en État (JME).

  1. Renforcement de l’amiable et du principe de coopération

Le juge est désormais encouragé à coopérer activement avec les parties et leurs avocats pour favoriser les modes amiables de règlement des différends. Ainsi, le juge n’est plus seulement arbitre du litige, mais devient un « chef d’orchestre » de la recherche d’une solution, amiable ou contentieuse.

Ce principe de coopération entre le juge et les parties s’inscrit dans les principes directeurs du procès civil, à l’article 21 du CPC (modifié par l’art. 2 du décret n° 2025-660 : « Il entre dans la mission du juge de concilier les parties et de déterminer avec elles le mode de résolution du litige le plus adapté à l’affaire. Les parties peuvent à tout moment convenir de résoudre à l’amiable tout ou partie du litige »).

Le juge peut proposer, voire imposer, aux parties une audience de règlement amiable, ou la désignation d’un médiateur ou conciliateur.

L’audience de règlement amiable pourra être organisée devant un autre juge que celui de l’instruction.

La décision d’orienter l’affaire vers l’amiable suspend le délai de péremption de l’instance, favorisant une négociation sereine.

Toutes les règles concernant les modes amiables sont désormais regroupées en un seul titre du CPC (Livre V).

  1. Nouvelles règles de compétence territoriale pour les mesures in futurum

L’article 4 du décret du décret n 2025-619 du 8 juillet 2025 « Magicobus 2 » complète l’art. 145 CPC par deux alinéas sur la compétence territoriale :

  • La juridiction compétente est, au choix du demandeur, soit celle pouvant connaître de l’affaire au fond, soit celle du lieu d’exécution de la mesure d’instruction ;
  • Pour les mesures portant sur un immeuble, compétence exclusive du tribunal du lieu de situation du bien.

Cette réforme vise notamment à désengorger le Tribunal judiciaire de Paris et à répartir ce contentieux sur le territoire national (Circulaire no CIV/07/2025 du 10 juillet 2024).

  1. Entrée en vigueur

Les deux décrets sont applicables à toutes les instances, dont celles en cours, à compter du 1er septembre 2025, sauf exceptions concernant :

  • Les conventions de mise en état (seules applicables aux procédures introduites après cette date) ;
  • Le nouvel art. 145 CPC, applicable aux instances et appels formés à compter du 1er septembre 2025.

Conclusion

Malgré certaines interrogations pratiques (faut-il craindre une sanction déguisée en cas de défaut d’instruction conventionnelle ? qui supportera le coût d’une médiation conclue par un accord ?, etc.), la réforme de 2025 constitue une évolution majeure du procès civil et commercial français, valorisant l’amiable, la souplesse conventionnelle et la co-construction des solutions.

Le rôle de l’avocat dépasse désormais la seule défense contentieuse : il devient acteur central de la démarche amiable, à la fois négociateur et conseiller stratégique dans le choix du mode de règlement le plus adapté.

Chez Lead Up, cette philosophie est au cœur de notre pratique. Nous accompagnons nos clients dans la prévention et la résolution de leurs litiges en privilégiant, chaque fois que cela est possible, la négociation et les modes amiables de règlement des différends (médiation, conciliation, procédures participatives, disputes boards), tout en restant des défenseurs expérimentés devant les juridictions lorsque le procès s’impose.